La sparterie, activité artisanale à base de matière végétale est pratiquée à travers, toute la Tunisie, Nabeul est sa capitale des nattiers.
La récolte des joncs, smar, était avant l’intervention du domaine public gérée d’une manière originale.
Les nattes qui couvrent les parquets des mosquées et des Mausolées des Saints, les entrées des maisons, les banquettes des cafés et comme isolation entre le lit et le parterre, et de parfaits tapis végétaux pour les travaux domestiques, séchage de couscous ou d’autres épices quand les nattes, couvertes de draperies immaculées sont étalées au milieu des patios ou sur les terrasses.
Les nattiers sont presque tous à Nabeul et au même quartier, le Rbat où s’étire la rue des nattiers.
Le travail du nattier se fait à domicile dans un atelier attenant à la maison à condition qu’il soit humide. L’atelier du nattier est souvent une grande pièce voûtée surmontée de soupente pour démultiplier l’espace.
La préparation des joncs est une opération qui nécessite un savoir-faire et une patience. D’abord le séchage à l’ombre et à l’abri de la pluie, sinon elles cassent ou pourrissent. Ensuite les joncs sont triés selon les teintes, la taille et le calibre pour assurer l’homogénéité de la trame et l’unicité tinctoriale de chaque pièce. Puis le nattier s’applique à teindre les joncs d’ornementation qui assurent les motifs et les rayures avec des couleurs naturelles d’origine végétale, généralement la garance et les écorces de grenades. Chaque nattier garde un secret pour réaliser ses teintes qui font sa célébrité.
L’année 1942 a connu la fièvre de production des nattes, l’armée allemande passa une grande commande pour le couchage de ses troupes et l’on introduisit la teinture chimique et d’autres couleurs par les produits de Ciba, Zondoz et Francolor.
Le métier et l’outillage n’exigent aucun capital le métier dit « noul » est fabriqué par le menuisier du coin. Un adage dit : « Le métier du pauvre donne le tapis du pauvre ».
Les ateliers, souvent attenant à la maison, sont signalés par des bottes de joncs dressés devant le seuil, jaune, vert, bordeaux et bleu violet. On étend à l’entrée de l’atelier, lumière oblige, les métiers horizontaux à peine surélevés. La trame est formée par des cordelettes d’alfa, ce qui donnait aux nattes une forme grossière et épaisse, l’introduction des fils en chanvre a permis non seulement la fabrication de nattes fines, mais d’autres objets en jonc bariolé : des cartables, des étuis à cigarettes, des paniers, des sets de tables et même des poufs et des dessus de chaises longues.
Le tissage se fait à deux ou à trois quand la natte est très large et le silence est roi. La dextérité des nattiers est manifeste et la concordance des mains démontrent d’un savoir-faire séculaire que l’on passe de père en fils.
La décoration se fait selon des motifs anciens de formes pures, comme sur les tapis, une sémantisation d’objets usuels, d’animaux et de fleurs, qui confèrent aux produits une ornementation nécessaire à leur commercialisation.
Les nattes sont vendues aux marchés du vendredi à Nabeul, et sur les autres marchés du pays, comme à Djerba et Gabès, leur commerce est souvent couplé avec le commerce de la poterie, comme on le constate au Souk de Sidi Mahrez à Tunis.
Malheureusement la déferlante des objets asiatiques en plastique fait envahir le marché, et l’on trouve aujourd’hui des nattes tissées dans des joncs en plastique qui sont même fabriqué en Jordanie.
L’autre activité de la sparterie est l’ouvrage de l’Alfa.
L’alfa pousse dans les régions des steppes entre Sidi Bouzid et Kasserine, elle est utilisée pour fabriquer des paniers servant aux activités agricoles, gros couffins pour la transport des fruits et légumes, des paniers plats pour éventer les céréales et arachides spécialité de la région, d’énormes bissacs, chargements des mules et surtout les scurtins nécessaires au pressage à froids des olives demandées par les huileries. Maintenant avec la multiplication des plages, les parasols sont formés de structures en bois couverts d’énormes nattes circulaires en alfa. Dar Chaabane et Hammamet conservent cette activité qui est menacée de disparition car les artisans sont presque tous sexagénaires.
Les couffins sont fabriqués A Somaa, Korba et Menzel Horr. Récupérées sur petits palmiers nains les folioles sont séchées, striées et tressées finement en bandes pour fabriquer couffins, sacs et chapeaux. De petites nattes ovales pour la prière individuelles, sajjada, sont aussi fabriquées dans ces localités, et ornées de palmes teintes comme les joncs des nattiers.